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L’anxiété de performance

À différents moments de nos vies, nous sommes confrontés à des embûches, des obstacles, des défis. Que ce soit aux études – avant un examen, lors d’un travail – ou en emploi, les occasions sont fréquentes d’être mis face à nous-mêmes, devant notre performance. Ce sont souvent des moments qui nous permettent d’apprendre sur soi, de vivre des difficultés (voire des échecs), d’y faire face et de se relever. 

Toutefois, il semble que dans les dernières années, et ce, de façon exponentielle, autant les jeunes que les adultes expriment vivre une montée de stress et d’anxiété reliée à la performance.

Plusieurs études ont mis en évidence l’augmentation de ce type d’anxiété, surtout chez les jeunes (tous niveaux d’études confondus).

En effet, bien que la plupart des étudiants soient capables de gérer le stress causé par les examens, les évaluations et la charge de travail souvent élevée, pour certains, cela provoque un niveau d’anxiété tel qu’il les empêche de composer avec ce que cela leur fait vivre et cette situation vient ainsi compromettre la poursuite de leurs études.  

 

Qu’est-ce que l’anxiété de performance? Elle est souvent décrite comme une peur intense d’échouer et de décevoir. La personne qui ressent ce type d’anxiété essaiera de tout faire, d’être bonne dans tout, tout le temps. La peur de l’échec, la peur de constater ses propres limites, la peur de ne pas rencontrer ses propres attentes et celles de son entourage sont des éléments qui font partie de ce que peut faire vivre l’anxiété de performance. 

Pourquoi ce type d’anxiété est-il si présent? Tout d’abord, il faut constater que l’anxiété sous toutes ses formes est en hausse dans nos sociétés occidentales actuelles. En ce sens, l’anxiété reliée à la performance n’échappe pas à cette tendance. Les causes en sont multiples, notamment le fait que nous évoluons dans une société axée justement sur la performance, avec les conséquences que cela engendre. Au niveau scolaire, la valorisation des résultats est un des premiers facteurs que l’on peut pointer du doigt. Les attentes du personnel enseignant en constituent un autre. Avec la surenchère relative au choix de l’école secondaire et la pléthore d’examens qui font maintenant partie de la réalité des élèves du primaire pour accéder à l’école de leur choix (ou du choix des parents), il est fréquent de voir des enseignants qui, voulant bien faire, contribuent à l’anxiété de leurs élèves en abordant, dès la 5e année, les difficultés associées à ces examens et l’importance de bien s’y préparer. Les parents tombent souvent, eux aussi, dans cette boucle infernale, notamment en payant à leurs enfants des cours de préparation aux examens d’entrée au secondaire. Pas étonnant que les niveaux de stress et d’anxiété, associés à cette étape du cheminement scolaire, augmentent et finissent par causer bien des nuits blanches, autant aux étudiants qu’aux parents (et aux professeurs).  

Dans le contexte actuel des choses, bien que les notes aient toujours été importantes pour une majorité d’étudiants à différentes époques, il semble que ce soit encore plus le cas maintenant, si bien que les étudiants résument souvent toute leur personne aux notes. En effet, bien des étudiants avouent être leur pire ennemi, par la pression qu’ils s’imposent à eux-mêmes, sans compter celle imposée par la représentation dans les réseaux sociaux, à laquelle ils sont confrontés quotidiennement.

On leur a tellement dit qu’ils étaient beaux et bons et qu’ils pouvaient tout réussir qu’ils tolèrent moins bien les difficultés et les échecs.

Ils ne savent pas comment composer avec ces moments plus difficiles  qui sont pourtant partie prenante de la vie  et ils appréhendent au plus haut point d’y être confrontés. De plus, ils en arrivent à un point tel que le mot « stress » est utilisé pour tout et est automatiquement associé à quelque chose de négatif, comme s’il était néfaste de ressentir du stress. Pourtant le stress est nécessaire dans la vie; il permet, par exemple, à un étudiant de bien se préparer pour un examen. Le stress est problématique lorsqu’il devient chronique. 

Les parents ont donc un rôle de premier plan à jouer, puisqu’ils sont les premiers modèles de leurs enfants. Nous sommes à une époque où les parents veulent le mieux pour leurs enfants, ce qui est tout à fait louable. Mais dans le but d’obtenir le mieux pour eux, ils se mettent eux-mêmes une pression qui se transfère éventuellement sur les enfants : choisir la meilleure école, celle qui va permettre à mon enfant d’atteindre tout son potentiel, celle qui va lui permettre d’apprendre plusieurs langues, celle qui va lui offrir plusieurs loisirs, toujours plus haut, toujours plus vite, et ce, dès la petite enfance. Est-ce vraiment cela que l’on veut donner comme modèle à nos enfants? Ces enfants qui seront les adultes de demain, aux prises avec une anxiété de performance qui ne les lâche pas et leur fait, la plupart du temps, craindre l’échec et faire tout pour l’éviter, plutôt que d’accepter que les échecs nous apprennent autant sur nous-mêmes que les réussites.  

En constatant à quel point les gens, de nos jours, sont souvent malheureux, souffrants, anxieux, ne serait-il pas nécessaire de se poser des questions sur cette course à la performance que l’on s’impose à soi-même, et que l’on impose à tout un chacun?  

 

Article de blogue écrit pour : www.orientaction.ceric.ca

Nathalie Ross, c.o. et psychothérapeute, travaille depuis plusieurs années à titre de conseillère d’orientation et de psychothérapeute auprès d’une clientèle variée, en pratique privée et pour l’organisme en employabilité CODEM. Elle est également superviseure clinique pour des équipes de c.o. et de c.e. et donne aussi à l’occasion des ateliers de formation et des conférences. Elle travaille avec la perspective psychogénétique depuis ses études en orientation à l’UQAM et avec la perspective ACT depuis quelques années. Elle est également présidente de l’Institut de recherche fondamentale et clinique en psycho-orientation (IRFCPO), institut qui chapeaute la perspective psychogénétique.
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